Cette histoire vraie illustre l’intérêt de « perdre » du temps à parler avec son équipe, de s’intéresser aux personnes, pas seulement à la productivité et aux objectifs de production.
Quand la météo de l’équipe désamorce une nuit de crise
Johan est responsable d’une équipe de nuit dans l’agro-alimentaire. Il y a quelques mois, il a décidé d’instaurer un rituel simple : chaque soir, avant de commencer le travail, chacun indique son humeur du moment avec un aimant sur un tableau. Soleil, nuage, orage. C’est ce qu’on appelle un « tour météo« .
Au début, il devait solliciter chaque personne. Puis l’habitude s’est installée : maintenant les équipiers viennent poser leur aimant en arrivant, sans qu’on le leur demande. Johan se contente de proposer la parole à ceux qui le souhaitent, sans insister. Il sait que certains préfèrent garder pour eux ce qu’ils traversent, et c’est leur droit. Mais ceux qui veulent parler savent qu’ils seront écoutés.
Un soir, la météo est à l’orage pour tout le monde. La charge de travail est exceptionnelle, et l’équipe arrive découragée, voire en colère. Johan les laisse s’exprimer. Puis il dit simplement qu’il comprend, que lui-même s’est senti découragé en voyant le programme. Mais il a préparé un plan. Il l’expose. Les autres sont sceptiques, mais prêts à essayer.
À la fin de la nuit, les quantités sont faites. Fierté collective 😎!

Sans ce tour météo, Johan n’aurait probablement pas obtenu l’adhésion de son équipe ce soir-là. L’orage aurait couvé en silence, chacun ruminant sa frustration dans son coin. Au lieu de cela, les émotions ont été posées sur la table, et l’énergie a pu se concentrer sur l’action.
Les objections que j’entends systématiquement
Quand je propose cet outil en formation ou en coaching collectif, les réactions sont souvent vives.
« Les gens ne voudront jamais dire comment ils vont. » C’est vrai au début. Beaucoup diront qu’ils vont bien, par réflexe ou par pudeur. Mais avec le temps et la régularité, la confiance s’installe. L’équipe de Johan n’a pas basculé du jour au lendemain.
« Et si quelqu’un va mal à cause de sa vie personnelle ? On n’est pas assistantes sociales. » Personne ne demande de résoudre les problèmes personnels des équipiers. Mais savoir que quelqu’un traverse une passe difficile permet d’être plus attentif, d’éviter de lui ajouter du stress inutile. C’est de l’attention, pas de l’intrusion.
« C’est intrusif. » Ça peut l’être, si c’est mal fait. Le principe est simple : chacun partage ce qu’il veut, quand il veut. On ne force personne à s’expliquer.
« On n’a pas le temps, on est là pour travailler.« Trois minutes. C’est le temps que prend un tour météo. Trois minutes qui peuvent éviter des heures de tensions non dites, de malentendus ou de démotivation silencieuse.
« On va nous mettre la pression pour que tout le monde affiche du soleil.« Il n’y a pas de météo cible. L’orage est une information précieuse, pas un échec. C’est justement quand l’équipe ose montrer qu’elle n’est pas en forme que le manager peut agir.
Ce que Johan a découvert
Au départ, Johan voyait la météo comme un outil pour renforcer la cohésion de son équipe. Il a découvert autre chose : c’est aussi un outil de performance. En permettant aux émotions de s’exprimer, il libère l’énergie collective pour le travail. Les non-dits ne disparaissent pas, ils s’accumulent. Le tour météo leur donne une issue.
Johan a suivi la formation « Responsable de production : outils et méthodes pour une réussite durable » (voir le programme ici). Le tour météo fait partie des pratiques qu’il a choisi d’expérimenter entre deux sessions. C’est devenu un rituel quotidien de son équipe.
Comment créer un suivi « météo »
Le suivi « météo » devrait s’inscrire dans le cadre d’un point quotidien ou hebdomadaire de l’équipe, dans lequel on balaye plusieurs éléments représentés par des éléments visuels.
Un modèle fréquemment employé pour suivre la météo ressemble à celui qui est dessiné ci-dessous.
L’idée c’est qu’on a des aimants avec les prénoms (on peut y mettre les photos aussi) de chaque personne de l’équipe (on crée à la main un aimant pour toute nouvelle personne). Et ensuite chacun vient mettre son aimant dans la zone qui représente le mieux son humeur du moment.
Pendant le point, au moment de balayer le sujet « météo », l’animateur (le chef d’équipe en général) peut demander si quelqu’un veut dire quelque chose au groupe. Si des gens ont mis leur nom dans nuageux ou orageux, l’animateur dit simplement qu’il passera voir les personnes concernées tout à l’heure.
En principe une personne qui n’a pas mis son aimant dans une des trois cases est absente. On peut donc prévoir une quatrième case, dans laquelle sont positionnés tous les aimants des personnes absentes. Certains séparent même en deux cases, absences prévues, absences imprévues. Comme ça tout le monde voit. C’est du management visuel utile !
Et maintenant ?
Et vous, avez-vous des histoires à raconter dans lesquelles tout le monde est gagnant, et l’entreprise aussi, lorsqu’on s’écoute plus, qu’on est plus attentif à l’état d’esprit des collègues ?
