Vivons-nous la fin d’un modèle, d’un cycle historique ? Ce qui est certain, c’est que les modèles de réussite qui ont fondé l’organisation de nos entreprises (et de nos Etats), sont de moins en moins adaptés au monde d’aujourd’hui.

Je vous propose donc aujourd’hui de réfléchir à des actions qui permettraient à nos entreprises de vivre sereinement et durablement malgré, et avec, les mutations profondes de notre environnement économique et social. 

Changer de modèle pour nos entreprises ?

Des philosophes et autres penseurs proclament que nous vivons la fin d’un cycle. Les crises que nous vivons ne seraient que les manifestations visibles d’un changement majeur des modèles (paradigmes), dans le monde entier.

L’échelle est vaste (cycles de plusieurs centaines d’années, la planète entière) et je me sens bien incapable d’avoir un avis global. Par contre, je vois bien les faiblesses d’un état central en France et celles d’entreprises, tout aussi centralisées, dans lesquelles la hiérarchie décide et les subordonnés exécutent.

Je viens de lire le long article de Marc Halevy, La fin du modèle français et du social-étatisme, et il m’inspire des réflexions concrètes, qui pourraient fonder de nouvelles manières d’agir.

Il faut en effet agir, changer nos modèles d’organisation, pour pouvoir nous adapter à un nouvel environnement économique dans lequel les clients sont toujours plus exigeants, les concurrents jaillissent d’endroits où on ne les attendaient pas, et les marges se réduisent.

Des relations infantilisantes et néfastes

Je rencontre régulièrement des chefs d’entreprise qui se plaignent du manque de « conscience professionnelle » ou d’initiatives de leurs salariés.
running with the seagulls

Des salariés qui ne font qu’exécuter, ça signifie que l’entreprise stagne, qu’elle ne peut s’adapter que si les décideurs en perçoivent la nécessité et réussissent à trouver une solution. Mais croyez-vous qu’il existe des décideurs omniscients, et capables de réagir en quelques secondes au moindre changement ? C’est comme si on croyait qu’un groupe d’oiseaux en vol pourraient être gouvernés par un seul oiseau « chef » sans désastres  ! Une entreprise adaptable et réactive, c’est une entreprise dans laquelle chaque individu prend des initiatives, réfléchit et trouve des solutions.

Les chefs d’entreprise qui se plaignent du manque d’initiatives de leurs salariés ont raison. Ce n’est pas bon pour l’entreprise d’avoir des salariés qui ne font que ce qu’on leur demande

Nous pourrions considérer que ce sont les salariés qui ont changé, et qu’on n’y peut donc rien. Mais ce serait accepter que nos entreprises sont vouées à la faillite, faute d’être capable de se renouveler.

Nous devrions donc considérer que c’est à nous, chefs d’entreprise, de changer le modèle managérial pour que les salariés se comportent dans l’entreprise comme à l’extérieur, en personnes actives et non passives.  J’aime beaucoup ce qu’écrit Marc Halevy dans l’article cité précédemment :

« En France, tout doit être soumis à l’Etat qui s’autoproclame obstinément plus apte à résoudre les problèmes individuels que les individus eux-mêmes … cela conduit à une totale infantilisation du peuple(…). Cette infantilisation force le peuple de choisir, (…), entre être un « enfant soumis » (…), être un « enfant rebelle » (…) ou être un « enfant créatif » (…). Ces trois types infantiles font face à un Etat omniprésent qui oscille entre les deux postures connues : celle du « parent nourricier » (la démagogie et le populisme socialistes et leur leitmotiv vide et creux contre les « injustices ») et « parent autoritaire » (la démagogie et le populisme gaulliste et leur leitmotiv aveuglément irréaliste des « ambitions pour la France dans le monde »). » – Marc Halevy

Dans les entreprises, les « enfants » sont tous ceux qui rangent leur cerveau au vestiaire à l’arrivée au travail. Les « enfants soumis » font ce qu’on leur demande et pas plus, les « enfants rebelles » critiquent et font obstruction, les « enfants créatifs » trouvent des moyens de faire autrement que les procédures en place. Mais aucun ne met son énergie au service de son entreprise. Et l’entreprise ne dispose plus que de l’énergie et de l’intelligence de son dirigeant et d’une poignée d’autres personnes qui ont réussi à trouver une place d’adulte dans l’entreprise.

La seule solution, c’est de redonner leur place à tous les salariés (et plus largement les partenaires) de l’entreprise. Et c’est possible, en acceptant de changer notre vision des relations humaines dans l’entreprise.

Générer des idées et des actions à tous les niveaux

Laissons de nouveau Marc Halevy nous orienter :

« La solution vient de l’analyse transactionnelle : tuer le père (l’Etat) et déniaiser l’enfant (le peuple) afin d’instaurer, dans nos beaux terroirs naturels et culturels, des relations enfin adultes et autonomes, entres les personnes, les communautés de vie, les régions authentiques et l’Europe unie. C’est cela ce libéralisme dont la France s’est montrée, depuis la Renaissance, totalement incapable. C’est pourtant cette voie libérale qui est au cœur de la mutation paradigmatique que nous vivons et qui est la seule alternative possible face au suicide collectif que sont en train de nous organiser, conjointement, les social-étatismes européens et le modèle américain financiariste et anti-écologiste. » – Marc Halevy

Si le libéralisme et instaurer « des relations enfin adultes et autonomes » entre les personnes et les communautés, je suis à 150% pour le libéralisme !

Qu’aurions-nous à gagner à des relations adultes et autonomes au sein des entreprises ?

  • Imaginez que demain, un des employés, face à l’insatisfaction d’un client, réfléchisse à des alternatives et propose une nouvelle façon de fonctionner !
  • Imaginez que l’un de vos salariés collabore avec l’un de vos fournisseurs afin de vous permettre de ne jamais manquer d’un composant essentiel sans avoir besoin d’en stocker plus que le strict nécessaire !
  • Imaginez que quelques salariés revoient ensemble les relations entre deux postes afin d’éliminer les stocks d’en-cours et les retouches !
  • Imaginez, tout est possible !

Par où commencer ?

Vous allez vous heurter aux habitudes :

  • Les salariés ont l’habitude d’exécuter les décisions des autres ;
  • Ceux qui ont décident depuis longtemps vont avoir du mal à ne plus le faire pour tout.

Pour changer ses habitudes, il ne suffit pas de le décréter. Je vous propose donc de choisir un sujet dont le fonctionnement n’est pas satisfaisant et de constituer un petit groupe de travail pour améliorer.

En introduction, du groupe, vous annoncerez clairement que votre objectif est que ce soit le groupe, et pas vous, qui décide ce qui mérite d’être expérimenté. Vous ne déciderez que lorsque une expérimentation sera jugée satisfaisante par le groupe et qu’il faudra valider son officialisation.

Votre rôle ne sera pas de décider, mais de pousser le groupe (4 à 6 personnes max) à faire preuve de créativité pour explorer les causes des dysfonctionnements puis de courage pour réaliser les premières expérimentations et les ajustements nécessaires. Evidemment, vous pouvez également faire appel à une consultante comme moi pour faciliter et accélérer la production de votre groupe de travail. Mais vous pouvez également démarrer seul, en vous appuyant sur votre conviction qu’il faut trouver d’autres formes d’expression dans l’entreprise.

Et maintenant ?

Et vous, allez-vous transformer les relations au sein de votre entreprise ? Comment pensez-vous vous y prendre ?

Quelques sources d’inspiration et liens utiles

La fin du modèle français et du social-étatisme, de Marc Halevy

Le livre de Isaac Getz et Brian M. Carney, Liberte & Cie, qui présente de manière très vivante l’expérience d’entreprises en Europe ou aux Etats-Unis. Vous y trouverez en particulier l’histoire de FAVI, une entreprise française « libérée » depuis plus de 10 ans et qui exporte jusqu’en Chine ses pièces pour boîtes de vitesse automobile. C’est une belle illustration de la façon dont des relations « adultes et autonomes » au sein de l’entreprise renforcent sa performance.

Le manifeste « de quels leaders avons-nous besoin ? » qui propose entre autres « Arrêtez de penser que vous êtes payés pour avoir réponse à tout. Nous voulons suivre des leaders qui comprennent qu’ils sont dépendants des autres pour réussir. »

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