Intéressante conférence ce matin à la Technopole Quimper Cornouaille ! Guillaume CHEVALIER (Le Shift) nous a parlé d’Innover comme une startup. Il s’adressait à des dirigeants d’entreprises de filières peu technologiques, ou en tous cas peu numériques. Il a très bien réussi le difficile exercice d’illustrer comment des activités traditionnelles peuvent s’inspirer de l’état d’esprit  et des méthodes des startups pour booster leur performance.

En voici mon résumé. Je n’ai pas cherché à être fidèle au contenu mais plutôt à le transcrire ce qui m’a semblé essentiel, et les réflexions que ça m’inspire.

Qu’est-ce qu’une startup ?

Pour diffuser l’esprit startup et ses méthodes agiles, il faut d’abord savoir ce qu’est une startup et comment elle fonctionne. En résumé, une startup, c’est très différent d’une entreprise existante car elle se trouve à la croisée des chemins sur 3 axes :

  • Elle ne sait pas précisément quel produit ou service elle va vendre ;
  • Elle ne sait pas à qui elle va le vendre ;
  • Elle ne sait pas comment elle va pouvoir financer l’activité (pas de business model défini).

Certains pourraient déjà dire que si c’est la définition d’une startup, il n’y a rien à apprendre d’elle pour une activité traditionnelle ! C’est vrai, mais c’est complètement faux !

  • Une entreprise traditionnelle ne sait pas précisément quel produit ou service elle devrait développer. Guillaume CHEVALIER nous disait que 50% des lancements de nouveaux produits se soldent par un échec.
  • Les entreprises traditionnelles se plaignent tout le temps du fait que leurs clients veulent des prix plus faibles. On peut donc considérer qu’elles ne savent pas précisément qui sont les clients qui ont véritablement intérêt à acheter leur produit ou service au « bon » prix ;
  • Elles savent comment elles financent leur activité. Mais qui peut dire comment elles financeront leur activité future ? Prenez une activité plutôt simple comme celle de chauffeur de taxi. Comment financer l’activité lorsque des Uber entrent sur le marché aujourd’hui ? Et demain lorsque les voitures autonomes remplaceront l’automobile telle nous l’avons connue ? On peut regretter l’irruption de la transition numérique dans nos vies, mais on ne peut pas ignorer qu’elle va générer de profonds chambardements dans l’économie. Et si c’est le cas, il vaut mieux remettre dès maintenant en cause son business model plutôt que d’être acculé au changement plus tard….

Finalement les entreprises traditionnelles sont appuyées sur un socle confortable de certitudes. Mais celles-ci peuvent être balayées du jour au lendemain. Ma conviction profonde, c’est que les entreprises traditionnelles doivent remettre leurs clients au centre de leurs préoccupations dès aujourd’hui et étudier comment elles peuvent s’adapter à leurs usages.

Prenons l’exemple, simplifié (voire caricatural !), d’une conserverie de poisson. Cette filière existe depuis 1920 environ et les produits ont très peu évolué : des poissons plus ou moins découpés dans des sauces plus ou moins sophistiquées, enfermés dans des récipients étanches puis chauffés vigoureusement pour en tuer les microbes.

Sur le marché de la RHD (Restauration Hors Domicile), les ventes régressent.

Plusieurs témoignages indiquent que les entrées de poisson en conserve servies en cantines scolaires sont boudées par les enfants. Les responsables de cuisine boudent donc les produits de la mer en conserve et se tournent vers d’autres produits, aux coûts et valeurs nutritionnelles semblables, qui plaisent plus à leurs petits clients (certains diraient usagers, je déteste ce mot !).

Une conserverie de poisson orientée vers la RHD peut, si elle veut assurer l’avenir, soit se diversifier vers d’autres produits alimentaires soit remettre ses clients au cœur de ses préoccupations. Si elle choisit cette deuxième option, elle va chercher à mieux comprendre qui sont ses clients et surtout comment ils utilisent les produits.

Elle pourra ainsi constater que les produits sont utilisés de manière très classique : des filets de maquereau avec une sauce posés sur une assiette par exemple. En parlant avec les cuisiniers, elle va se rendre compte qu’ils ne considèrent pas vraiment ces conserves comme des ingrédients utiles pour des préparations plus attrayantes.

La conserverie pourra alors concevoir de nouveaux produits qui seront des ingrédients mieux appropriés ou apporter une prestation de service à ses clients en leur donnant des idées de recettes faciles à mettre en œuvre, voire en les formant à cette mise en oeuvre.

C’est là un exemple simpliste, et l’entreprise dont je m’inspire n’en est qu’au tout début du chemin. Mais on voit bien comment la remise en cause de son modèle peut générer des innovations, de produits, mais aussi d’usages ou d’organisation.

Comment fonctionnent les startups qui réussissent ?

Très schématiquement, les startups fonctionnent selon des étapes itératives, afin d’améliorer petit à petit la définition du produit ou service, des clients et du business model :

  • Expérimenter ;
  • Utiliser son intuition ;
  • Ecouter les retours du marché ;
  • Apprendre et recommencer.
Sortir du Cadre

Sortir du Cadre

Ces itérations rapides permettent de formuler des hypothèses (« les clients veulent ça » ou « les clients sont prêts à payer 10 € pour ça »),  à expérimenter puis à mesurer objectivement les éléments qui permettent de valider ou invalider l’hypothèse. Cette méthode, dite « lean startup » a été développée en 2008 par Eric Ries. Son livre,  « Lean Startup. Adoptez l’innovation continue », a été traduit en français et publié chez Pearson en 2012. L’un des slogans de la méthode est « work smarter, not harder » (travaillez plus intelligemment, pas plus dur).

Le gros intérêt de la méthode, pour les startups comme pour les entreprises traditionnelles, c’est de réduire les risques au maximum, en apprenant et en expérimentant pour passer de l’idée à un business viable le plus rapidement possible.

Comme le disait Steve BLANK (dont la théorie du « développement par la clientèle » a beaucoup inspiré Eric Ries),  « aucun business plan ne résiste au premier contact client ». Il est donc temps d’abandonner les business plan et de travailler main dans la main avec ceux qui décideront in fine, nos clients ! Chaque itération est l’occasion d’une confrontation avec leurs points de vue et donc l’occasion d’ajuster et d’apprendre.

Quelques outils employés par les startups

Guillaume CHEVALIER a très bien su nous montrer que l’approche des startups est surtout une affaire d’état d’esprit et de méthodes. Il a volontairement peu parlé des outils utilisé. Je vais donc en dire très peu dessus, encore moins qu’il n’en a dit. Je list simplement ci-dessous les outils cités et quelques liens vers des ressources externes sur ces sujets.

  • Canevas « business model » : un outil pour formaliser ses idées sur le business model d’une gamme de produits ou services. Formidable comme support à l’innovation. Sur wikipedia en anglais, sur le site en anglais des concepteurs du canevas.
  • Design thinking ou autres méthodes de conception à partir d’une écoute attentive (et observation) des clients. J’ai lu récemment cet article au sujet du design thinking en bibliothèque. Les documents téléchargeables, conçus avec IDEO, expliquent très bien ce qu’est le design thinking et comment on peut l’appliquer.
  • Landing page pour mesurer l’attractivité d’un concept : une page web sur laquelle les gens intéressés peuvent s’inscrire, voire acheter le produit ou service. C’est un bon moyen de mesurer objectivement le retour client des différentes expériences menées. On peut utiliser des outils tels que Launchrock ou Strikingly, même si on n’a pas de connaissances en web. Des publicités Facebook bien ciblées peuvent amener des prospects sur la page.
  • MVP ou Produit Minimum Viable : le produit minimum qui permet de tester le marché pour commencer à tester nos hypothèses et apprendre (en savoir plus avec cet article).

Et au final

Je connaissais déjà le lean startup mais j’ai trouvé très intéressant d’assister à la présentation de Guillaume CHEVALIER :

  • Ca me motive pour mettre personnellement en œuvre la méthode lean startup et cesser de procrastiner sur de nouveaux services que je voudrais proposer ;
  • Les questions de la salle m’ont fait mieux prendre conscience du fossé qu’il y a encore à franchir pour que toutes les entreprises écoutent vraiment leurs clients au lieu de se concentrer sur elles-mêmes et ce qu’elles font déjà.

Et je me prends à rêver ! Imaginons que notre conserverie de poisson adopte la méthodologie lean startup . Est-ce qu’elle n’irait pas encore plus loin ? Si au lieu de chercher à vendre ses produits existants ou de développer des dérivés, elle cherchait une nouvelle proposition de valeur et qu’elle la testait, est-ce qu’elle n’arriverait pas à un produit / service réellement innovant et qui résoudrait les problèmes de ses clients ?

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